C’est un petit format carré, encadré de bois, un peu passé, un peu jauni. Sous un ciel bleu d’enfance, une ferme ardéchoise. Robuste, mais un peu déglinguée comme le sont souvent ces maisons de paysans. Si on s’approchait un peu, on verrait sans doute quelques poules picorer dans la cour, les clapiers sous la remise et plus loin, la volière aux pigeons. Le bateau amiral, comme tu l’appelais. Navire immobile dans le grand pré fleuri qui vous protégeait de tous les naufrages.
Cette photo, tu l’as récupérée dans la chambre de l’Ehpad, une fois qu’il a fallu la vider.
C’est toi qui la lui avais posée bien en vue sur sa table de nuit. À quoi bon des portraits de ses filles, de ses petits-enfants. Sa maison était son trésor ; le puits d’eau fraiche en était source de vie, les collines et les vignes, un havre pour son âme tourmentée.
Toi qui n’aimes pas les photos exposées aux yeux de tous, tu avais choisi ce cliché pris le jour de tes quatorze ans.
L’a-t-elle reconnu seulement, cette photo, votre capitaine foudroyée ?
Depuis, l’épreuve fanée gît chez toi, sur un coin d’étagère poussiéreuse, discrète, si discrète. Tu ne la regardes plus, ta maison, mais tu sais qu’elle est là. Et qu’elle y restera toujours. Telle qu’en ce joli printemps de tes quatorze ans.
J'ai pleuré ...C'est beau, beau, beau.
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