mardi 24 mars 2020

Enquête de terrain




“Gendarme Fougasse, allez jeter un œil  à la cabane au fond de la cour !”


Il maugréait le gendarme Fougasse en faisant crisser ses chaussures à clous sur les gravillons blancs.
Toujours pour moi les ordres pourris : il fait au moins 40 degrés dans cette cour… C’est pas à moi qu’on aurait dit de visiter les étages, ou encore mieux d’aller explorer les caves… assez joli le pavillon d’ailleurs, un peu vieillot quand même. Pas beaucoup de sous pour les réparations la Vieille… 
Il savait d’avance ce qu’il trouverait dans cette cabane : le bric à brac habituel du jardinier : pioches et râteaux, bottes et galoches, paniers hors d’âge, tabouret pour faire la pause… Le chef voulait l’occuper, c’est tout…
La porte était ouverte.  Pas méfiante la Mémé. Un moment pour s’habituer à la pénombre après la lumière aveuglante, et il s’avança un peu. Surprise ! Tout y était,  comme prévu, mais parfaitement rangé, outils au garde à vous dans les râteliers, chaussures sur les étagères, arrosoirs alignés par taille et le frigo dans le fond. La présence d’un frigo dans une cabane de jardin ne l’étonnait pas plus que ça, il avait quasiment le même dans son atelier, un vestige des années 60 décoré  comme celui là de vénilia bariolé. Pratique pour ranger les clous, ficelles et autres petits objets indispensables.  
Rien à trouver  dans un endroit pareil. Sour la tôle ondulée du toit la chaleur devait être  encore plus étouffante. Il faillit faire demi tour, « après tout un coup d’oeil c’est un coup d’œil » 
Mais retraverser la cour et y faire le planton  en attendant les autres… au dessus de ses forces.
 Là au moins il était à l’abri  du soleil et des graviers aveuglants. Il traversa jusqu’au  frigo. 
La lumière lui sauta au visage en même temps que le froid. Il  était branché ! Bizarre ! Et encore plus bizarre son contenu. Des conserves, beaucoup de conserves soigneusement étiquetées. On ne met pas des conserves au frigo. ! Elle devait perdre un peu la boule la Vieille…
Sur la clayette supérieure les confitures,  de jolis pots tous pareils recouverts de cellophane et d’un chapeau  en vichy mauve. Sur l’étiquette, une écriture fine, un peu penchée, un peu tremblée …abricot, poire, mirabelle…
La fraîcheur qui émanait de l’ensemble était délicieuse. Le Gendarme Fougasse attrapa le tabouret et s’installa devant la porte grande ouverte. Il enfila ses gants, bien décidé à prendre son temps pour un inventaire particulièrement méticuleux.
C’est au fond de la troisième pile qu’il trouva le bocal, dissimilé derrière les autres. Même format, mais pas de capuchon mauve et pas d’étiquette. A l’intérieur une boule de sopalin avec des traces noirâtres ! Une truffe ! C’est ainsi qu’il les conservait lui au fond du frigo quand la cueillette du dimanche avait été bonne. Il eut des visions d’omelettes baveuses et la tentation de mettre dans sa poche une possible pièce à conviction…
Il dévissa le pot. L’odeur le fit tomber à la renverse.
Le gendarme Fougasse venait de trouver l’objet de la perquisition,  ce que tout le monde cherchait depuis huit jours : 
la phalange du PDG

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